La chambre de la naufragée

A sa montre, il était 16h17. Et 35 secondes. Puis 36. 37. 38. 39. A 45, Killy était toujours en train de faire les cents pas. Plus le temps passait, plus son habituel calme était dévoré par l'anxiété.

- Je ne dois pas culpabiliser, j'ai fait ce que j'avais à faire, je ne pouvais pas aller plus vite, je...je...


Killy balbutiait à lui-même des paroles pour rassurer son angoisse. Mais il fut finalement interrompu par la sortie du docteur de la pièce qui abritait la jeune fille sauvée des eaux. Ce dernier rassura de manière flegmatique Killy, en lui disant simplement qu'après l'avoir examinée qu'elle avait inhalé beaucoup d'eau, qu'il lui faudrait beaucoup de repos mais qu'elle récupèrerait ses forces peu à peu.

Le jeune prince fut immédiatement soulagé. Mais étrangement, quelque chose continuait de le tracasser, même si il ne s'en rendit pas tout de suite compte. Il prit rapidement congé du médecin, après quelques énièmes recommandations de sa part, et décida d'aller se reposer sur le canapé, dans le salon, à quelques mètres de la chambre. Il ne s'écoula qu'une heure ou deux quand il se réveilla, l'esprit embrouillé.

- Décidément je déteste toujours autant dormir en journée...maugréa-t'il.

Mais son esprit était encore en alerte, la première chose à laquelle il avait pensé, en se levant, n'était autre que le visage de la belle endormie sur la plage. Il décida de faire irruption dans la chambre de la survivante, afin de s'assurer lui-même que son état s'était stabilisé et, le cas échéant, la rassurer sur le lieu qu'elle occupait présentement.

Il poussa la porte...

[HRP]J'vais sans doute arriver à me dégotter une petite demie-heure ! Je suis vraiment désolée de ne pas venir assez souvent, mai je suis très prise ! J'vais faire une bonne ch'tite réponse pour aider le fo à avancer ![/HRP]


Son cher maître n'arrêtait pas de bouger ; Rubis le regarda faire pendant quelques minutes, mais s'apercevant que si elle n'était pas faite de métal, elle allait finir par avoir la gerbe, elle tourna le regard, avant de s'étonner en se rendant compte qu'elle s'ennuyait finalement ferme, et de voir à nouveau Killy aller de droite à gauche puisque de toute façon, il était stupide de penser qu'elle allait avoir la gerbe puisqu'elle était faite de métal.
Couchée près de la porte d'où ne tarderait pas à sortir le médecin, pur leur annoncer une fois de plus que tout allait bien, blablabla... la routine quoi ! Et l'autre andouille qui croyait que tout était de sa faute et tentait de se convaincre du contraire... Malheureusement, étant le gardien de la famille, Rubis devait aussi lui faire garder le moral coûte que coûte. Elle couina donc légèrement, comme pour rassurer Killy... qui sembla ne pas l'entendre...

Enfin, le médecin sortit et dit au maître des lieux que tout allait bien pour la jeune sauvée. Killy sembla perdre en force à cette annonce, à croire que c'était vraiment un gars bizarre ! Rubis le vit donc aller s'allonger sur le canapé à côtés d'elle... Depuis qu'il étaient arrivés là, Killy ne lui prêtait plus d'attention, et c'était mieux ainsi, mais elle se demandait s'ils n'allaient pas finalement tous faire ça dans la famille ! C'était assez... terrible ! Si tout le monde abandonnait Rubis avant qu'elle n'ait trouvé le moyen de rentrer enfin chez elle, qu'allait-elle faire ?!
Pendant que son maître dormait, la créature métallique remua mille et une pensées... et les remua un millier de fois puisqu'il lui suffit d'une seconde pour que toutes ces pensées lui traversent l'esprit...

Et au bout d'une heure, enfin, l'autre fainéasse se réveilla. A peine venait-il d'ouvrir les yeux qu'il bondit de son lit et alla ouvrir la porte. Le médecin avait été très clair là dessus : personne ne devait entrer dans la chambre de la jeune fille échouée sur la plage ! Rubis fit alors le même bond et attrapa son maître par le premier morceau de tissu qu'elle trouva sous sa dent de fer : le pantalon. Tenant donc Killy par la "peau des fesses", elle se dirigea tranquillement vers le canapé malgré les éventuelles protestations du jeune homme - éventuelles car elle avait coupé ses capteurs auditifs, donc elle n'entendait rien - et le posa gentiment avant d'aller fermer la porte, et de s'assoir devant pour la garder.

_ Arf ! fut sa seule parole. Une parole pleine de sens, nette, claire et précise.

Gardant ses capteurs auditifs éteints, elle convint que ne s'étant elle-même pas entendue, elle les réactiva et aboya fermement une seconde fois. Oui, c'était bien ce qu'elle avait dit. Et bien le ton sur lequel elle avait voulu le dire.
A présent que ses capteurs auditifs avaient été réactivés, elle avait la flemme de les éteindre à nouveau, et était finalement disposée à écouter toute parole de la part de Killy... au moins, ça lui ferait autre chose à brasser que es propres idées !

Killy a écrit:

Il poussa la porte...

...Et la referma aussitôt, d'un magistral coup de pied involontaire sans même avoir pu faire le moindre pas en avant. En effet, une force défiant les lois de la gravité l'avait littéralement aspiré en arrière, et en l'espace d'un dixième de seconde ses fesses, puis le reste de son corps venaient de subir un bond en arrière d'au moins 10 mètres. Rubis venait d'intervenir et d'attraper l'arrière-train de son maître - plus exactement son pantalon - pour le faire revenir, malgré lui, à son emplacement précédent.

- Mais qu'est-ce qu'il te prend ? lui demanda-t'il.

Sous l'effet de surprise, on aurait dit que Killy s'attendait à recevoir une réponse de son chien, durant les secondes qui suivirent sa question. Décontenancé il eut du mal à se rappeler que son chien ne pouvait ni comprendre le langage des humains, encore moins lui répliquer par autre chose que des aboiements. Aboiements qui survinrent au même moment, comme par enchantement. Rubis fixait désormais Killy, et Killy en faisait de même. A la différence près que ce dernier tentait de retrouver une part de se lucidité dans cette fixation, quand l'autre n'y faisait que regarder l'ahurissement général de son maître.

- ... Après tout, c'est toi qui est dans le vrai, mon cher truc. Je vais me contenter d'aller chercher quelques vêtements secs pour notre invité, cela serait indécent de la voir déambuler en tenue trop légère dans les allées du château.

A peine ses paroles prononcées, Killy s'empressa d'accomplir ce qui constituait sa nouvelle mission. Il quitta ainsi le rez-de-chaussée pour se rendre au premier étage, l'étage réservée aux dames de la maisonnée, là où il comptait bien trouver de quoi habiller convenablement son étrange hôte.


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